mercredi 11 juillet 2018

Fromage et finale

Authentique mauvaise foi et authentique violence au Lion d’Angers

(je vous laisse deviner le nom du restaurant)

J’ignorais jusqu’à ce jour, qu’aller au restaurant pouvait prendre une tournure aussi grand-guignolesque. Hier soir, je suis carrément entré dans la quatrième dimension !
Ah, si seulement je pouvais sereinement parler de mon dîner, offert par un ami de passage (2 menus à 38 € et 3 verres de vin = 85 €) ! Mais non.
Habituellement, quand je prends la peine de réserver, je trouve une table qui m’est destinée en arrivant. Là, rien. « Vous pouvez vous installer par là ». Bon.
Mon ami se renseigne sur le saumon d’Alaska.
 - Est-il fumé ? 
 - Non.
- Mais encore ?
(Gestes évasifs représentant vaguement une carte ?) Eh bien, l’Alaska...
- Oui, mais c’est quoi comme saumon ?
Là, je reconnais que mon ami aurait dû être plus précis et demander s’il s’agissait d’une darne, d’un pavé ou toute autre chose. Du coup, on l’a renseigné sur la race de la bête, car dit la dame un peu contrariée : il y a beaucoup de sortes de saumons
Ah, les quiproquos !
Bon, mon ami s’est rabattu sur une autre sorte d’ichthys. 

Pour ma part, j’ai pris du bœuf, qui s’avéra ferme et le couteau dont je disposais n’était pas adapté. Je n’ai donc pas fini. Réprobation visible : à l’enlèvement des assiettes, l’atmosphère qui était déjà plutôt fraîche devint glaciale en dépit des 26° C de cette soirée. 
Disparition de la serveuse, remplacée par : le patron ? Le cuisinier ? Le gérant ? Il ne nous a pas salués et ne s’est jamais présenté. Mon ami demande à cet homme singulièrement froid quel bon vin il lui recommande pour accompagner son assortiment de fromages. Réponse sèche : un Cadillac. Le quidam se tourne vers moi avec hargne, l’air de dire « il est pas bon mon vin ? » :
- D’ailleurs c’est ce que vous buvez, non ? 
- Euh… Oui… sans doute… (j’avais oublié, j’admets).
Mais, bon, je croyais en toute innocence que le client était roi. Là, apparemment, on est prié de manger sans moufeter, de tout trouver génialissime et de payer en remerciant en prime le patron d’avoir passé une exécrable soirée.
Mon ami de 84 ans n’a pas fini son fromage. Erreur fatale ! Le Cerbère des lieux lui assène, courroucé, des borborygmes où je comprends vaguement « pas mangé fromage aux truffes » (mais je me trompe peut-être).
Echanges de regards interrogateurs. Vu le ton, on se dit qu’il y a un truc qui ne va pas. Le gaillard enlève l’assiette vivement en éructant des paroles désagréables. Je suis bon prince, mais je lui fais remarquer que nous sommes des clients et que nous avons droit à un minimum d’égards. Là-dessus, il me déclare que quand il pose une question, il attend une réponse.
- Au lieu de rouler des yeux en regardant votre collègue, dit-il à mon ami.
Il mime celui-ci en faisant des grimaces.
« Collègue », des grimaces : la quatrième dimension, je vous disais !
J’exprime mon mécontentement en déclarant que je ne remettrai pas les pieds dans son établissement et que je lui ferai la publicité qu’il mérite auprès de mes relations.
- Des clients comme vous, on s’en passe et on les connaît les gens qui se vengent sur Tripadvisor. Méfiez-vous, je vous attaquerai pour diffamation !
Je pense en moi-même que pour le coup, il en fait tout un fromage et lui déclare tout le mal que je pense de son attitude grotesque. Cet olibrius nous annonce qu’il nous sortira à coups de pieds au derrière si on continue. Hallucinant !
Mon ami se fâche et hausse le ton – il n’aurait pas dû, mais bon – en réclamant l’addition.
- Déplacez-vous au comptoir, si voulez payer !
D’un seul homme, nous répondons fermement non. L’appât du gain étant le plus fort, l’homme se déplace jusqu’à notre table avec force commentaires se voulant humiliants : j’espère que vous connaissez votre code, sinon votre carte sera avalée (il plane ou quoi ? voilà qu’il se prend pour un distribanque !) Le code fait, il en rajoute une couche en simulant un défaut de son terminal : « Votre compte n’est pas approvisionné ! » Finalement, le ticket sort (bien entendu) et j’ironise : « On en a  de la chance ! » Insensible à l’humour, il fanfaronne : « Vous êtes soulagés ! Vous n’étiez pas sûrs d’avoir de l’argent sur le compte ? »
Finalement, on sort très remontés et on oublie le pull de mon vieil ami.
Bon. Demi-tour au bout de trente mètres parcourus. Retour devant le resto et porte close à 20H45. L’homme déclare à mon ami que le restaurant est fermé et qu’il doit repasser le lendemain s’il veut revoir son pull. Mon ami entreprend de rentrer quand même récupérer son bien en essayant d’enjamber une petite palissade qui sépare la terrasse de la rue, mais l’homme le repousse violemment. Je ne sais par quel miracle, mon vieil ami de 84 ans ne s’est pas fracassé le crâne contre le trottoir ! Toujours est-il qu’il est resté accroché en équilibre instable jusqu’à mon intervention verbale et mon bras salvateur.
Putain de fromage !
Je réclame le pull et l’obtiens.
Nous faisons demi tour et croisons une voiture de gendarmerie. Ah, je me dis : puisqu’il nous avait un moment menacés des forces de l’ordre au cours de ses logorrhées ridicules : allons-y ! Surtout que le comportement de ce bonhomme avait été violent.
Les gendarmettes entament difficilement une discussion avec le malfaisant, car il n’écoute pas et raconte je ne sais quoi sur notre compte, ou sur le sien, car il semble très imbu de sa personne. Elles essayent vainement de lui faire comprendre que même si mon ami n’avait pas à enjamber la palissade, il n’avait pas non plus à être violent.
Nous partons, en remerciant malgré tout les forces de l’ordre qui ont d’autres chats à fouetter et sous les quolibets de cet être médiocre qui nous traite entre autre « d’agents de la Gestapo ».
Quand je vous disais que j’avais été piégé dans la quatrième dimension !
Enfin, bref, il y a des soirs, comme ça, où on se dit qu’on aurait mieux fait de se vautrer devant la télé avec un plateau repas et une bonne bière !
Enfin, c’est pas grave : on est en finale !



 

 


 

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