mardi 5 juin 2012

Aux alentours de 1969...


LE PERE SUREAU
(Cassagnes, Gard, 1993)

    Aujourd’hui, c’est le grand jour. Nous allons interviewer le père Sureau, le forgeron du village. Pendant deux jours, avec notre maître d’école, nous avons appris les grandes lignes de ce noble métier du feu et concocté une série de questions.
    Le père Sureau nous fait les honneurs de son antre. Apparemment ému d’avoir autant de visiteurs, il bredouille un peu. Il nous montre des outils barbares, la forge rougeoyante, l’enclume monumentale ; le puissant marteau-pilon, puis il réalise sous nos yeux un soc de charrue avec force commentaires. Le maître a apporté son magnétophone et enregistre consciencieusement la prestation.
    Nous, on rigole un peu sous cape car on le connaît au village, le père Sureau ! D’abord il picole sec, ensuite il dit de sacrés gros mots ! Bien sûr, ça ne manque pas : il lâche un monumental chapelet de jurons à cause d’un outil malintentionné. On est drôlement contents !
     Le maître nous demande de poser nos questions au père Sureau. Nous obtempérons un par un, le micro à la main et pas peu fiers ! Le père Sureau est impressionné par toute cette "technique", quand tout à coup il rougit et porte la main à sa bouche en signe de confusion : il vient de comprendre que l’ensemble de ses propos a été enregistré !
    De retour à l’école, le maître nous fait écouter la bande magnétique afin que nous puissions mettre notre travail par écrit. Nous éclatons tous de rire au passage des gros mots et le maître nous dispense malicieusement de les retranscrire. 
    Nous serions drôlement attrapés sinon : il y en a plein qu’on ne connaît même pas !

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