CHAMBRE A PART (2)*
Pièce en un acte
De Lionel de Messey
(sociétaire adjoint SACD)
Pièce en un acte
De Lionel de Messey
(sociétaire adjoint SACD)
Pièce ayant pour thèmes : le futur, le voyage temporel, le choc des cultures.
Durée : environ 30 minutes
Distribution :
MAUD : aristocrate très bon chic bon genre. En chemise de nuit.
CHARLES-HENRY : époux de Maud, un rien coincé. En pyjama.
LA SPATIONAUTE : exprime très peu d’émotions. Costume genre « Star Trek » requérant des accessoires : une plaque de police, une télécommande (transpondeur) un clavier sur une manche, un bouton sur une épaule, un « néon » vert qui s’allume grâce à un interrupteur sur un côte du torax.
LE SPATIONAUTE : exprime peu d’émotions, sauf quand il appuie sur son épaule (le générateur d’émotions). Costume idem à spationaute sauf qu’il ne possède pas de transpondeur et qu’il a une bande lumineuse rouge.
LE GNAKOUT : animal domestique - bipède - venu d’Alpha du Centaure, hirsute et bêtisier. Il a une grosse truffe noire et son pelage est constitué de grosses tâches de plusieurs couleurs. Il porte un collier.
LE PHOTOGRAPHE : très professionnel et à l’affût de la photo « choc ». Un peu râleur. Costume des années cinquante.
L’ASSISTANTE : moyennement aimable. Un côté vieille fille. Costume année cinquante. Elle a un chien qui s’appelle Kiki (une peluche pour la facilité de mise en scène !) Elle trimballe le matériel du photographe.
BRAYARD : un chevalier en armure du seizième siècle, poltron au possible. Il ne crache pas sur la gent féminine.
VOIX OFF : Plusieurs sonorités à cette voix en raison d’un bug : un coup synthétique, un coup humaine, une autre fois façon « Terminator », une fois complètement déjantée…
Quelques bruitages à prévoir.
Décor : Une chambre à coucher d’un château ou hôtel particulier, ou maison de ville, avec une très belle cheminée à trumeaux (si possible) deux lits, un beau tapis, une grande armoire sur un des côtés. Des tables de nuit supportant les lampes de chevet. Prévoir un passage derrière l’armoire pou les aller/venues du gnakout.
Costumes : en fonction de chaque personnage et précisés dans la rubrique « distribution »
Tout public
Synopsis : La chambre d’un couple très bon chic bon genre devient le théâtre de rencontres impromptues à cause de visiteurs du futur (genre Star Trek) dont la technologie connaît quelques ratés.
* Il existe une version sans le Gnakout, plus courte : Chambre à part (1)
Durée : environ 30 minutes
Distribution :
MAUD : aristocrate très bon chic bon genre. En chemise de nuit.
CHARLES-HENRY : époux de Maud, un rien coincé. En pyjama.
LA SPATIONAUTE : exprime très peu d’émotions. Costume genre « Star Trek » requérant des accessoires : une plaque de police, une télécommande (transpondeur) un clavier sur une manche, un bouton sur une épaule, un « néon » vert qui s’allume grâce à un interrupteur sur un côte du torax.
LE SPATIONAUTE : exprime peu d’émotions, sauf quand il appuie sur son épaule (le générateur d’émotions). Costume idem à spationaute sauf qu’il ne possède pas de transpondeur et qu’il a une bande lumineuse rouge.
LE GNAKOUT : animal domestique - bipède - venu d’Alpha du Centaure, hirsute et bêtisier. Il a une grosse truffe noire et son pelage est constitué de grosses tâches de plusieurs couleurs. Il porte un collier.
LE PHOTOGRAPHE : très professionnel et à l’affût de la photo « choc ». Un peu râleur. Costume des années cinquante.
L’ASSISTANTE : moyennement aimable. Un côté vieille fille. Costume année cinquante. Elle a un chien qui s’appelle Kiki (une peluche pour la facilité de mise en scène !) Elle trimballe le matériel du photographe.
BRAYARD : un chevalier en armure du seizième siècle, poltron au possible. Il ne crache pas sur la gent féminine.
VOIX OFF : Plusieurs sonorités à cette voix en raison d’un bug : un coup synthétique, un coup humaine, une autre fois façon « Terminator », une fois complètement déjantée…
Quelques bruitages à prévoir.
Décor : Une chambre à coucher d’un château ou hôtel particulier, ou maison de ville, avec une très belle cheminée à trumeaux (si possible) deux lits, un beau tapis, une grande armoire sur un des côtés. Des tables de nuit supportant les lampes de chevet. Prévoir un passage derrière l’armoire pou les aller/venues du gnakout.
Costumes : en fonction de chaque personnage et précisés dans la rubrique « distribution »
Tout public
Synopsis : La chambre d’un couple très bon chic bon genre devient le théâtre de rencontres impromptues à cause de visiteurs du futur (genre Star Trek) dont la technologie connaît quelques ratés.
* Il existe une version sans le Gnakout, plus courte : Chambre à part (1)
A l’ouverture, éclairage au plus faible : on devine la pièce.
MAUD (depuis son lit, paniquée) - Allumez la lumière mon ami ! J’entends du bruit !
CHARLES-HENRY (depuis l’autre lit) - Plaît-il ?
MAUD (allumant sa lampe de chevet) - De grâce ! Levez-vous et hâtez-vous Charles-Henry !
CHARLES-HENRY (se levant plein d’espoir) - Vous voulez que je rejoigne votre couche, ma Maud adorée ?
MAUD (agacée) - Il s’agit bien de cela ! Chaussez plutôt vos savates !
CHARLES-HENRY (enfilant ses savates et une robe de chambre, grognon) - Voilà une perspective beaucoup moins grisante !
MAUD - Allumez la lumière à présent !
CHARLES-HENRY (il appuie sur l’interrupteur, pleins feux donc) - Voilà, voilà ! (Exprimant sa contrariété.) Puis-je enfin savoir de quoi il s’agit ? Je dormais très bien à l’instant, figurez-vous !
MAUD - N’oyez-vous rien ?
CHARLES-HENRY (interloqué) - Non. Je ne noie rien ni personne ! Que me chantez-vous ?
MAUD (exaspérée) - Oyez ! Du verbe ouïr, sapristi !
CHARLES-HENRY - Non, je n’ois rien, pas plus que je n’ai ouï… Pourquoi ? Il y a quelque chose à entendre ?
MAUD - Ah, oui : j’ai ouï et j’ois toujours !
CHARLES-HENRY (contrarié) - Tant mieux si vous êtes en joie, mais vous troublez mon sommeil !
MAUD - Dieu, que vous êtes agaçant ! (Désignant l’armoire.) J’entends du bruit par là.
CHARLES-HENRY (s’approchant de l’armoire) - Sans doute quelque souris…
MAUD - Des souris ? Quelle horreur ! Elles vont grignoter ma garde robe !
L’armoire branle et craque sérieusement.
CHARLES-HENRY (avec un mouvement de recul devant l’armoire) - Diable ! Ces souris ont mangé du lion !
MAUD (se signant) - Seigneur, Marie, Joseph ! Nous avons dû offenser votre ancêtre Louis-Auguste ! Il revient d’outre tombe pour nous morigéner ! (Elle se cache sous les draps.)
CHARLES-HENRY - Pourquoi mon ancêtre viendrait-il nous chapitrer ? Ne fleurissons-nous pas sa tombe dignement à la Toussaint ?
MAUD (sortant la tête des draps) - Si fait, mais nous brocardions son drôle de nez en trompette pas plus tard qu’hier au soir !
CHARLES-HENRY - Certes, j’en conviens, mais l’offense ne justifie pas qu’il vienne nous tirer par les pieds ! De toute façon, il y a prescription…
MAUD - Que voulez-vous dire ?
CHARLES-HENRY - Nous ne faisions que railler son portrait qui date du seizième siècle… (Un temps.) Et dont la fidélité reste à prouver !
MAUD (scandalisée) - Comment ? Votre ancêtre était volage ?
CHARLES-HENRY - Je l’ignore. Je parlais du portrait qui n’est peut-être pas ressemblant.
MAUD - Ah ? (Désignant l’armoire.) Qu’y a-t-il donc dans cette armoire ?
CHARLES-HENRY (s’emparant d’une des savates roses de son épouse et la brandissant courageusement) - Un cambrioleur égaré sans doute ? (Il tourne la clef de la porte de l’armoire et l’ouvre d’un air menaçant.) A nous deux mon gaillard !
Les deux battants s’ouvrent et apparaît tout d’abord une femme vêtue en costume de spationaute (ou similaire, genre « Star Trek »)
CHARLES-HENRY (abasourdi) - Ma…Madame ? (Il lâche la savate rose.)
MAUD (outrée) - Une femme dans notre armoire ? Charles-Henry ! Espèce de débauché ! Vous cachez des femmes dans nos placards ? Je parie que c’est votre secrétaire !
CHARLES-HENRY - Pas du tout ! Je ne connais pas Madame ! Du reste, vous savez bien que je ne rapporte jamais de travail à la maison !
La spationaute sort de l’armoire et inspecte les lieux du regard étonnée, mais froidement. Un homme sort derrière elle.
MAUD - Là ! Il y a un homme qui sort de l’armoire !
CHARLES-HENRY - Oui, oui, je vois bien ! Ce qui prouve bien qu’il ne s’agit pas de ma secrétaire : elle n’est pas mariée. Vous devriez être rassurée.
MAUD - Rassurée ? Comment voulez-vous que je sois rassurée ? Il y a des gens qui se promènent dans ma garde robe, et vous voudriez que je sois rassurée ?
LA SPATIONAUTE (consultant un genre de télécommande sorti d’une de ses poches et se promenant dans la chambre) - Il semblerait que les coordonnées ne soient pas bonnes.
LE SPATIONAUTE (suivant la spationaute) - Effectivement, j’ai trouvé la porte temporelle un peu récalcitrante…
LA SPATIONAUTE - Non, non, il s’agit de la porte de l’armoire. Quoiqu’il en soit le téléporteur a foiré.
LE SPATIONAUTE (observant la pièce avec étonnement) - Où sommes-nous ?
CHARLES-HENRY - Dans notre chambre à coucher, figurez-vous !
Le gnakout surgit de l’armoire en émettant des sons joyeux et en bondissant dans tous les sens.
LE GNAKOUT - Gnak ! Gnak ! Gnak ! Ouuuuut ! Gnak ! Gnak !
CHARLES-HENRY (s’écartant de la trajectoire de l’animal) - Diable ! Qu’est ceci ?
MAUD (horrifiée) - Doux Jésus !
LE SPATIONAUTE - C’est le gnakout de ma femme…
LA SPATIONAUTE - Mais enfin, que faites-vous avec un animal de compagnie dans le cadre d’une mission ? Ce n’est pas réglementaire !
LE SPATIONAUTE - Il a dû me suivre à mon insu… Il est très mal dressé. (S’adressant au gnakout.) Filou ! Ici ! Au pied ! (Le gnakout va se cacher sous le lit de Maud en émettant des sons joyeux.) Quand j’vous disais qu’il était mal dressé !
MAUD - Appelez la police Charles-Henry !
LA SPATIONAUTE (montrant un badge) - Nous sommes de la police. Inspecteur Colomba et sergent Piotr. (Elle désigne son compagnon.)
MAUD - Mais que fait la police dans notre armoire ?
LE SPATIONAUTE - Nous l’ignorons. (S’adressant à Charles-Henry.) C’est vous Landru ? Au nom de la loi intergalactique, je vous arrête !..
LA SPATIONAUTE (arrêtant d’un geste son partenaire) - Mais non, voyons. Ce n’est pas Landru. Puisque les coordonnées ne sont pas bonnes.
LE SPATIONAUTE - Ah, ben oui !
LA SPATIONAUTE (s’adressant au couple) - Pardonnez-le, c’est un blond.
CHARLES-HENRY - Qu’il soit blond, brun ou gris, nous n’en avons cure !
MAUD - C’est juste ! Puisque vous êtes sortis de notre armoire, à présent sortez aussi de notre chambre ! Et faites sortir ce gnakout de dessous mon lit !
LA SPATIONAUTE - Ce n’est pas si simple. Je dois reconfigurer mon transpondeur temporel.
Le gnakout s’extrait de dessous le lit, prend un livre sur la table de nuit et sort par la porte.
CHARLES-HENRY - Oui, c’est ça ! Allez pondre ailleurs !
LE SPATIONAUTE (sur un ton neutre) - Soyez poli avec l’inspectrice. C’est pas passque vous êtes pas Landru qu’on va tout tolérer. Je suis très fâché.
CHARLES-HENRY (surpris) - Ah, bon ? Vous êtes fâché ?
MAUD - Quelle curieuse façon d’être courroucé ! Pas un mot plus haut que l’autre !
LA SPATIONAUTE (à son partenaire) - Activez votre générateur d’émotions : vous voyez bien que vous n’êtes pas crédible.
LE SPATIONAUTE (activant son générateur placé sur l ‘épaule qui est détraqué et le fait rire) - Ha ! Ha ! Ha ! Soyez poli avec l’inspectrice ! Ha ! Ha ! Ha ! C’est pas passque vous êtes pas Landru qu’on va tout tolérer ! Ha ! Ha ! Ha ! Je suis très fâché ! Ha ! Ha ! Ha ! Merde alors ! Ha ! Ha ! Ha ! Mon générateur est déglingué ! Ha ! Ha ! Ha !
LA SPATIONAUTE - Déconnectez le : c’est ridicule. (Le spationaute obtempère.) Je fais une nouvelle tentative avec le transpondeur. (Elle tape un code sur sa télécommande.) Voilà.
Un grésillement se fait entendre : un photographe et son assistante sortent de l’armoire.
LE PHOTOGRAPHE (observant autour de lui) - Allons bon, nous voilà déjà rendu à la nuit de noce !
L’ASSISTANTE - Mais non, Bernard ! Il y a bien trop de monde !
LA PHOTOGRAPHE - Cela ne prouve rien ! De toute façon, je ne sais pas si c’est prévu dans le contrat. (Un temps.) Bon, puisqu’on est là, on va faire quelques clichés ! Envoyez le matos Laura ! (Il joint le geste à la parole, son assistante déballe le matériel d’une valise.)
MAUD - Oh ! Charles-Henry ! Faites quelque chose ! Notre chambre se transforme en hall de gare ! (S’adressant au photographe qui la prend en photo.) Non, non ! Je suis toute décoiffée !
Le gnakout sort à nouveau de l’armoire plus calmement, mais l’air idiot, une feuille de papier sort de sa bouche tandis qu’il mâchonne.
CHARLES-HENRY (arrachant la page qui dépasse de la bouche du gnakout et la lisant) - Mais ? C’est mon livre !
LE GNAKOUT (s’éloignant en faisant un signe désobligeant) - Gnak ! Gnak ! Gnak ! Burp ! (Il va manger des fleurs qui ornent un vase sur la cheminée.)
LA SPATIONAUTE - Le transpondeur est déréglé lui aussi… D’ailleurs, revoilà votre gnakout.
LE SPATIONAUTE (prenant le transpondeur des mains de l’inspectrice) - Je peux essayer ? (Il tripote les boutons et un nouveau grésillement se fait entendre.)
LA SPATIONAUTE (inspectant l’armoire) - Ce coup ci, il ne se passe plus rien.
Quelqu’un frappe à la porte de la chambre. C’est Brayard, le chevalier poltron.
MAUD - Allons bon ! Qui peut frapper à notre porte à cette heure indue ?
CHARLES-HENRY (allant ouvrir) - A la porte de notre chambre qui plus est !
Brayard entre sans formalité et va se coucher à côté de Maud horrifiée.
BRAYARD (regardant autour de lui) - Ventre saint-gris ! Qu’est-ce que vous foutez chez moi ?
Le gnakout va se coucher sur le lit de Charles-Henry.
MAUD (tirant les draps au ras de son cou par pudeur) - Mon Dieu ! Charles-Henry, faites quelque chose !
CHARLES-HENRY - Monsieur ! Veuillez sortir instamment de la couche de ma femme ! Ce n’est pas votre place ! En plus vous êtes tout habillé !
BRAYARD (Il enlève son heaume) - Vous avez raison ! (Reluquant Maud.) La donzelle est appétissante ! Cela me donne des envies ! (A Maud.) Vous verrez : je suis très doué pour le repos du guerrier !
MAUD - Mais ?.. Monsieur !.. Je ne vous connais pas ! Et je n’ai envie de rien !
CHARLES-HENRY (intervenant) - Sortez de notre lit et rhabillez-vous !
BRAYARD (sortant du lit aidé par Charles-Henry) - Faudrait savoir ! (Attirant Charles-Henry, en direction de l’armoire pour ne pas être entendu.) Rassurez-moi sur un point : sommes-nous en terre amie ?
CHARLES-HENRY - Comment cela ?
BRAYARD - Et bien je fuyais… Euh… je me battais vaillamment contre le perfide Anglois… Et tout en courant, je me suis retrouvé devant votre porte !..
CHARLES-HENRY - Mais qui êtes-vous ? Vous sortez d’un bal costumé ou quoi ?
BRAYARD - Je suis le chevalier Brayard… Vous avez dû entendre parler de moi ?
LE PHOTOGRAPHE - Vous voulez dire le chevalier Bayard ? Le chevalier sans peur et sans reproche ?
BRAYARD (surpris et confus) - Euh… Oui ?.. Brayard pour être précis ! Et oui : j’ai même pas peur !.. (Il découvre le gnakout sur le lit de Charles-Henry, cela l’effraie et le fait sautiller dans tous les coins.) Ah ! Mon Dieu ! Qu’est-ce que c’est ?
CHARLES-HENRY (agacé, désignant un siège) - C’est un gnakout ! Asseyez-vous là ! (Brayard obtempère, non sans avoir esquissé un geste de la main pour se protéger la tête à la manière des gamins.)
LE PHOTOGRAPHE (haussant les épaules) - Un comique ! Mais au fait : c’est quoi un gnakout ? (Il le prend en photo.)
LE SPATIONAUTE - L’animal de compagnie de ma femme.
L’ASSISTANTE (d’un air dégoûté) - C’est quoi comme race ?
LE SPATIONAUTE - Ben… un gnakout quoi ! C’est originaire d’Alpha du Centaure…
L’ASSISTANTE - C’est assez moche ! Et ça doit manger beaucoup…
LE SPATIONAUTE - L’avantage, c’est que ce n’est pas délicat : ça mange de tout.
CHARLES-HENRY - Je le confirme : il m’a dévoré tout un bouquin ! Roman pourtant indigeste… Mais, bon ! Nous n’allons pas passer la nuit là-dessus !
MAUD - Surtout que cet animal est sur votre lit mon ami !
CHARLES-HENRY (éjectant le gnakout de son lit pour le mettre à la porte) -Allez ouste ! (Se bouchant le nez.) Il empeste en plus !
LE GNAKOUT (râlant et faisant des grimaces épouvantables) - Gnagnagnagnagna !
LE SPATIONAUTE - Vous le contrariez. Quand le gnakout est contrarié, il dégage paraît-il une forte odeur.
MAUD (se bouchant le nez) - Je vous le confirme ! Ne sentez-vous rien ?
Tout le monde se pince le nez sauf les spationautes.
LA SPATIONAUTE - Nous avons la chance d’être anosmiques.
LE PHOTOGRAPHE - Anosmique ? Qu’est-ce que ça veut dire ?
LA SPATIONAUTE - Nous sommes dépourvus d’odorat.
CHARLES-HENRY (fermant la porte sur le gnakout) - Avec un gnakout contrarié dans les parages, c’est une bénédiction !
BRAYARD (riant) - C’est un animal qu’on apprécie singulièrement quand on ne peut plus le sentir !
LA SPATIONAUTE (tirant son collègue par la manche) - Reprenons, voulez-vous ? (Se grattant la tête.) Voyons, en quelle année sommes-nous ? Visiblement, nous ne sommes pas en 1917 ?
CHARLES-HENRY - Nous sommes en 1952 et il est minuit passé !
BRAYARD (éclatant de rire) - Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Je me gausse ! Nous sommes en 1502, pal sang bleu !
MAUD (paniquée) - Des fous ! Nous sommes cernés par des fous !
LE PHOTOGRAPHE - Nous ne sommes pas fous : je confirme que nous sommes bien en 1952 !
MAUD - Je vous rappelle tout de même que vous sortez de mon armoire !
L’ASSISTANTE - On ne l’a pas fait exprès !
BRAYARD (se levant inquiet) - Moi, je ne sors pas de l’armoire ! Alors dites-moi ce qui se trame ici ! Je guerroyais l’Anglois il y a peu : aurais-je été occis ? Sommes-nous au Purgatoire ? Ou pire, aux Enfers : si j’en crois les créatures démoniaques et nauséabondes qui hantent ces lieux ? (Il fait moult signes de croix.)
LE PHOTOGRAPHE (il prend des photos de Brayard, admiratif) - Quel comédien !
LE SPATIONAUTE - Non, il s’agit d’une chambre à coucher et vous m’avez l’air bien vivant. Par contre, il est certain que vous n’êtes pas à votre place ni à la bonne époque, désolé.
LE PHOTOGRAPHE (à son assistante) - Je manque de lumière, passez moi le flash.
LA SPATIONAUTE (expliquant) - Nous avons eu des problèmes techniques : nous nous sommes télé-transportés à la mauvaise époque. En voulant corriger le problème, on a fait apparaître ces photographes qui sont de la même époque mais d’un autre lieu ; ensuite, on a encore modifié les paramètres et vous êtes apparu dans le futur. Enfin, pour nous c’est du passé.
LE PHOTOGRAPHE - Pour nous ça serait plutôt du chinois !
Le flash jaillit.
BRAYARD (se précipitant sous les draps à côté de Maud horrifiée) - Quelles sont ces diableries ? (Il se signe.) En 1952 ? Pourquoi pas en l’an 2010 (ou l'année en cours) tant que vous y êtes ?
MAUD - Sortez de mon lit ! Vous allez salir les draps avec votre armure ! Elle est toute rouillée !
BRAYARD (implorant) - De grâce, madame ! Je réclame asile !
CHARLES-HENRY (se levant et sortant manu militari Brayard du lit de son épouse) - Tous les prétextes sont bons pour satisfaire vos plus bas instincts !
BRAYARD (pleurnichant) - Je n’ai point le cœur à lutiner et Dieu sait pourtant que je ne suis pas de bois !
L’ASSISTANTE - On avait remarqué ! Tas de ferraille !
BRAYARD (allant se cacher dans l’armoire) - Je veux bien être caché dans l’armoire !
LE PHOTOGRAPHE (s’adressant à Maud, tout en photographiant) - Lâchez ce drap et montrez moi votre épaule ! (Maud obtempère.) Voilà ! Bien ! Mettez un doigt dans la bouche et prenez un air ingénu (Maud obéit.) Très bien ! oui ! Défaites vos cheveux et mettez vos bras derrière la nuque ! (Maud fait ce qu’on lui demande.) Superbe ! Un bisou à l’objectif ! Bien ! Tu es amoureuse de l’objectif ! Comme ça, oui ! Maintenant, tu vas me faire descendre ta chemise de nuit langoureusement…
MAUD (reprenant ses esprits) - Et puis quoi encore ? (Elle se renfonce dans les draps jusqu’au cou.) Qui vous a permis de me tutoyer ?
LE PHOTOGRAPHE (se retournant vers son assistante) - Voilà qu’elle me fait des caprices de star !
L’ASSISTANTE - C’est pour ça que je préfère les animaux ! (soudain inquiète.) A propos, il est où Kiki ? (Elle arpente la pièce à la recherche de Kiki, regarde sous le lit…) Kiki ? Kiki ? (Inquiète.) J’espère que le gnakout ne l’a pas mangé !
CHARLES-HENRY (après avoir observé la scène, interloqué) - Cela suffit ! Laissez ma femme tranquille ! Et il n’y a pas de Kiki chez moi ! (S’adressant à la spationaute.) Quant à vous, expliquez-moi : que faites-vous chez nous et pourquoi vouliez-vous que nous soyons en 1917 ?
L’assistante sort par la porte en appelant son Kiki. Le gnakout en profite pour entrer et s’enfermer dans l’armoire.
LA SPATIONAUTE - Parce que nous avions régler le télé-transporteur sur cette date, mais apparemment il y a eu un dysfonctionnement.
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
LE SPATIONAUTE (se levant) - Si nous sommes en 1952, c’est râpé pour Landru.
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
LA SPATIONAUTE - Oui, il a été guillotiné en 1922…
LE SPATIONAUTE - On lui a coupé le…
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
LE SPATIONAUTE - … cou.
CHARLES-HENRY - Vous ne prétendez tout de même pas que vous venez du futur ?
LE PHOTOGRAPHE - Si c’est le cas, je vais prendre quelques photos ! (Il joint le geste à la parole.)
LA SPATIONAUTE - Si. Nous venons de l’année stellaire dix-sept, quarante-huit, point trois ; ce qui correspond à l’an trois mille cinquante de votre ère. En ce qui nous concerne, nous retournons dans le passé afin de résoudre des affaires criminelles ou afin d’obtenir des compléments d’enquêtes.
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
CHARLES-HENRY - Mais pourquoi Landru ? Cette affaire a été résolue et sa culpabilité ne faisait aucun doute !
LA SPATIONAUTE - Les descendants de ses victimes voudraient connaître certains détails…
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
CHARLES-HENRY - Il n’a jamais rien dit à son procès, je ne vois pas pourquoi il vous en dirait davantage !
LA SPATIONAUTE - Nous allons pénétrer ses pensées grâce au procédé « brain-cracking »
CHARLES-HENRY (ahuri) - « Brain-cracking » ?
LE SPATIONAUTE - Ben oui. On rentre dans sa tête quoi. Vous me faites rire.
CHARLES-HENRY - On ne le dirait pas !
LE SPATIONAUTE - C’est juste, il faut que j’active mon bazar. (Il appuie sur son activateur d’émotions et se met à pleurer.) Bouhouh ! Mon générateur d’émotions recommence à bafouiller ! C’est gonflant ! Bouhouhou !
LA SPATIONAUTE - Désactivez le, c’est ridicule. (A Charles-Henry.) Vous en savez assez : je vous rappelle que nous appartenons à ce corps d’élite appelé Police. Nous ne saurions tout divulguer.
LE PHOTOGRAPHE (hilare) - Ah, bon ? La police, c’est un corps d’élite ? Ben dis donc, ça promet le futur !
L’ASSISTANTE (en off) - Kiki ?
CHARLES-HENRY - Permettez-moi cette question : à quoi sert ce « générateur d’émotions » ? Vous ne ressentez donc plus rien dans le futur ?
LA SPATIONAUTE - A la naissance, les liaisons cérébrales qui génèrent nos émotions sont désactivées et remplacées par ce générateur que l’on n’active qu’en cas de nécessité absolue.
MAUD - Pourquoi faites-vous cela, Grand Dieu !
LA SPATIONAUTE - Les émotions sont la cause de beaucoup de conflits et de dérèglements. Grâce à ce système, notre raisonnement n’en est que plus juste.
LE PHOTOGRAPHE (ironique) - Ben dis donc ! Les artistes doivent se régaler avec un public qui n’éprouve rien !
LE SPATIONAUTE - Comme mon générateur ne fonctionne plus, Je tiens à préciser que je suis vexé. Qu’est-ce que vous croyez ? Les salles de concert et de théâtre sont bondées !
LA SPATIONAUTE - En effet, le sergent Piotr a raison. Les lieux de culture font salle comble. Chacun y connecte son générateur d’émotions et on peut alors entendre un joyeux tintamarre…
BRAYARD (depuis l’armoire) - Aïe ! (Il sort en claudiquant et en secouant la main.) Aïe ! Aïe ! Aïe ! Ouille ou youille !
LA SPATIONAUTE (se méprenant) - Un peu comme ça oui.
MAUD - Allons bon ! Le chevalier s’exprime en patois d’époque !
BRAYARD - Un rat ! Un rat m’a boustifaillé la jambe !
MAUD - Des rats dans mon armoire ? Dites tout de suite que notre maison est mal tenue ! Scélérat !
BRAYARD - C’est bien ce que je dis ! C’est les rats ! Les rats qui m’ont mordu !
CHARLES-HENRY - Allons donc ! Je veux bien admettre qu’il puisse y avoir des souris, mais des rats !
BRAYARD (inspectant sa cheville, assis au bord du lit) - Heureusement que j’avais mon armure ! Sinon, ils auraient fait ripaille !
L’ASSISTANTE (revenant dans la pièce) - Kiki a disparu ! (Elle ouvre l’armoire.) Je vais voir par là.
LE PHOTOGRAPHE - Laura ! Vous commencez à me gonfler avec votre kiki ! Je vous rappelle qu’on a un boulot !
Le gnakout surgit hors de l’armoire à quatre pattes. Il a des touffes de poils blancs dans la bouche qu’il expédie en soufflant.
BRAYARD (sautant sur le lit à la vue du gnakout) - Vertuchou ! Un des rats qui m’ont mordu !
LE SPATIONAUTE - Mais non, c’est le gnakout de ma femme. Il est très joueur…
MAUD - Monsieur ! Au risque de me répéter : descendez de mon lit ! (Elle le frappe avec son oreiller jusqu’à ce qu’il descende.)
CHARLES-HENRY (intervenant) - Sachez que mon épouse n’est pas du genre à faire des confidences sur l’oreiller !
L’ASSISTANTE (découvrant les touffes de poils et hurlant) - KIKI ! Le gnakout a bouffé mon Kiki !
LE GNAKOUT (rotant avec satisfaction) - Burp ! (Il sort par la porte après avoir pris un oreiller sur un des lits.)
L’assistante s’évanouit sur une chaise, retenue par les spationautes.
LE PHOTOGRAPHE - Bon débarras ! Son satané clebs passait son temps à pisser sur le matériel ! (Aux spationautes) Mais, dites-moi : comment vit-on à votre époque ? Le réchauffement climatique, la surpopulation, les problèmes énergétiques, c’est résolu ?
LA SPATIONAUTE - Je ne peux pas vous répondre.
LE PHOTOGRAPHE (surpris) - Pourquoi ça ?
LE SPATIONAUTE - …Au nom de la directive première.
CHARLES-HENRY (intervenant, curieux) - La directive première ? Qu’est-ce donc ?
LA SPATIONAUTE - Nous ne devons pas interférer sur le passé en divulguant des éléments susceptibles d’affecter le futur.
Si vous souhaitez interpréter ce sketch et donc obtenir la suite, vous pouvez contacter l’auteur : lionel.demessey@laposte.net sans oublier d’indiquer vos coordonnées les plus complètes possibles (nom de la troupe, adresse, email, etc.) ainsi que les dates de représentation.
Par avance merci.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire