LE GENERAL DOURAKINE
(Cassagnes, Gard 1993)
Le Général Dourakine me tient en otage. Je suis sa récalcitrante victime ! Maman m’a dit que je devais lire un peu si je ne voulais pas devenir un “petit ignoramus”. Je n’aime pas lire ces histoires qui sentent le moisi à cause du livre trop vieux, je préfère Tintin ou les livres d’animaux ! En attendant, je suis coincé dans ma chambre en condamné de Dourakine, avec prière de faire un compte rendu oral du premier chapitre dès que je l’aurai lu. Mais je suis trop fâché pour lire ! En plus, la Comtesse de Ségur c’est l’ennemie qui me prive si souvent de Julie, ma compagne de jeux ! Je ne suis donc pas disposé à faire des concessions. Je mets le nez dans le bouquin par acquis de conscience, pour le retirer aussitôt : l’histoire date d’au moins un siècle, avec du passé simple à la pelle ! Bon, mon opinion est faite, cette histoire est idiote et les gravures qui l’accompagnent me confortent dans cette idée.
Maman me rappelle pour la troisième fois afin de savoir si je me suis enfin décidé à lire cette chère Comtesse Rostopchine. (Ah bon ? Ce n’était pas la Comtesse de Ségur ?) A ma mine renfrognée, elle comprend que non. Comme je ne veux pas lui faire de peine, j’invente d’après les images glanées çà et là, une histoire de vieille baderne qui bat ses enfants à chaque retour de campagne et que cela arrive couramment vu qu’il est plus souvent de retour qu’en guerre. Julie qui est toujours là quand je souhaiterais le contraire, fait de l’esprit en demandant à maman s’il s’agit d’une nouvelle version. Maman un brin irritée renonce à me faire lire et m’expédie jouer dehors. Je file comme un missile, ravi d’échapper à ce satané Dourakine, mais troublé cependant par cet avenir “d’asinus ignoramus” que l’on me prédit : je me demande bien ce que cela veut dire.
L’ignorance a parfois des côtés angoissants.
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